Tancrède Barale : un consultant passé par les plus grands palaces

L’expérience d’un ancien dirigeant des plus grands palaces français est l’une des plus précieuses qu’on puisse obtenir lorsqu’on souhaite créer un restaurant ou un hôtel.

Tancrède Barale, consultant inscrit sur Sensei, ancien directeur de la restauration du Meurice (Paris), ou à l’Hôtel de Paris (Monaco) est notre invité pour une interview exclusive !

L’occasion de nous partager quelques anecdotes vécues dans ces grands hôtels et nous parler de son activité comme consultant dans l’hôtellerie-restauration !

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Bonjour Tancrède ! Peux-tu nous expliquer en quelques lignes ton parcours, ton métier et nous présenter ta structure ? 

À la base « destiné » davantage pour le commerce que l’ingénierie, je démarre une université d’économie avant de me rendre compte que j’étais passionné de service, d’hôtellerie et de restauration. Je me lance alors dans le milieu en allant étudier à l’E.H.L. (École Hôtelière de Lausanne). 

Après une carrière de plus de 30 ans dans l’hôtellerie et la restauration de luxe, j’ai décidé de mettre mon expérience aux services des autres, et me mettre à mon compte. C’est ainsi que T.B.C. (Tancrède Barale Consultant – tout simplement) est née.

J’ai ainsi souhaité me sortir du côté opérationnel, et grâce à plusieurs opportunités de développement, en tant qu’indépendant,  j’ai ainsi pu me lancer et mettre le pied à l’étrier. T.B.C. s’est donc construit autour de plusieurs points majeurs : 

  • Le premier, c’est le Conseil « classique », et l’accompagnement de projets, de rénovation, d’extension, de rachat, de financement, de positionnement, de recherche d’investisseurs ou de financements pour des clients qui sont demandeurs, j’agis principalement avec des hôtels indépendants, et travaille avec tous les corps de métiers nécessaires à la création, rénovation, ou agrandissements d’hôtels et restaurants. 

  • Je fais aussi de la formation, et j’ai la chance d’avoir quelques clients intéressants et diversifiés. C’est à dire qu’avec le COVID-19, il a fallu quand même essayer de trouver des moyens de travailler malgré les confinements successifs. Je me suis ainsi diversifié dans la formation auprès, entre autres,  d’une société qui s’appelle Shiva (n° 1 du ménage et du repassage à domicile). Ils cherchaient un profil de type « hospitalité et management », pour proposer aux responsables d’agences des formations management plus orientées “service”. En 2020, j’ai également eu la chance de pouvoir être référencé par l’Ecole Hôtelière de Lausanne, la partie société de conseil (Advisory Services), en tant que consultant indépendant sur la France, afin de pouvoir les accompagner, lorsque de besoin, et me joindre à leurs missions, lorsqu’ils peuvent manquer de ressources, compte tenu de leur excellent développement en cours. 

  • La troisième activité, la moins importante, et qui est plus de l’accompagnement de bonnes connaissances qui requièrent mon aide, est l’immobilier. J’ai découvert que grâce à mon « réseau » et mes trente années de travail, j’avais beaucoup de connaissance et de sollicitations pour de la recherche d’acheteurs, ou de vendeurs d’hôtels et de restaurants. J’interviens donc ainsi à leur demande, en sous-traitance, bien souvent,  ou en collaboration avec des agents immobiliers et autres mandataires. Ils ont vu en moins la capacité de trouver des débouchés et de pouvoir apporter une belle plus-value dans une relation entre acheteur et vendeur sur la passation opérationnelle d’un dossier, au niveau des ressources humaines, opérationnelles, la sécurité, la maintenance ou tout l’aspect administratif (licences, accompagnement juridique, etc.). Je vais dire que c’est une très belle valeur ajoutée pour ma structure, mais j’essaye de n’y passer que peu de temps parce que c’est très chronophage. Bien entendu, le résultat peut être très prometteur en termes pécunier, mais ce n’est quand même pas le cœur de mon métier. 

Je suis également engagé au niveau associatif, puisque j’ai été élu à l’UMIH du Var. Je suis membre actif d’un club de directeurs de restaurants et d’hôtels, le CDRE France, ainsi que des anciens de l’Ecole Hôtelière de Lausanne pour la région PACA. Je fais également partie du Skal club qui est un club international initié il y a plus de 85 ans et qui regroupe les acteurs du tourisme de tout niveau. 

Le Splendid Hôtel (Bandol) que Tancrède a accompagné.

As-tu toujours été passionné d’hôtellerie-restauration ? 

Après mon bac C, je me suis inscrit à la faculté d’économie à Nice et puis je me suis lancé dans l’hôtellerie parce que j’ai rencontré un garçon extraordinaire, un ami marseillais, qui était plus âgé que moi et qui faisait l’Ecole Hôtelière de Lausanne. Il a très bien su me la “vendre”. De fait, mes parents ont ensuite eu l’opportunité de me l’offrir considérant que ce devait être ma destinée. J’étais garçon de café à la buvette du château à Nice, et j’ai appris à ne jamais quitter mon plateau donc à ouvrir les bouteilles de sodas entre les jambes ou sous le coude, et puis ma mère qui venait me récupérer le soir quand j’avais planté ma moto me disait « mais c’est absolument incroyable, on dirait que tu as fait ça toute ta vie, tu as un côté inné, tu es attentif aux clients, tu vois le cendrier plein, la capsule de coca qui est tombée par terre, les clients qui sont en train d’attendre, de te chercher du regard, etc. Tu es fait pour ça ! ». Et voilà, c’est vrai que j’ai de manière innée ce besoin de faire plaisir et de servir, et d’aller au-devant des besoins pour offrir une expérience la plus mémorable possible au client, à l’époque lorsque j’étais opérationnel, et maintenant en tant que consultant.

Quelles sont pour toi les qualités requises pour être un bon consultant CHR ? 

Je pense que comme pour tous les métiers, je pourrais parler de « hard-skills », et de « soft-skills ». Les hard-skills, ce sont les compétences théoriques que l’on peut acquérir grâce à sa formation et manière continue durant son expérience. Viennent ensuite les soft-skills, les compétences “douces” qui sont davantage les traits de caractère acquis par l’expérience, au fil du temps, pour permettre d’être meilleur, jour après jour, dans son management, son comportement, ses relations aux autres.. 

Il faut beaucoup d’humilité et d’honnêteté, c’est-à-dire savoir être à l’écoute, avec une vraie volonté de transmettre. Être à l’écoute, c’est pouvoir cerner le problème du client, et l’aider avec des solutions qui soient rapides, efficaces et bien ciblées. 

Il faut également beaucoup de maîtrise de soi, et savoir gérer l’imprévu : quand on est manager, on veut être exemplaire, donc il faut aussi avoir une attitude positive dans toutes les situations. Dans nos métiers, on capitalise beaucoup sur la gestion de l’imprévu, et de la catastrophe. Quand on est dans l’hôtellerie, dans la restauration, ou même le commerce, on a toujours un problème qui survient : un TPE qui ne marche pas, un four qui tombe en panne, etc. Il faut garder le côté positif, cette exemplarité et ce calme en montrant que l’on maîtrise complètement la situation, même si des fois elle est bien compliquée. Le consultant doit avoir un état d’esprit positif, voire un certain sens de l’humour dans certaines situations. 

Bien évidemment, le consultant, tout comme un manager, est un meneur d’hommes, et doit avoir un certain charisme, afin d’inspirer de la confiance. 

Beaucoup de valeurs tournent autour de l’initiative : être innovant, créatif, ce sont aussi des points importants, afin d’être précurseur sur le marché, car la réussite vient de là.

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Le PDG d’une grande marque de montres de haute horlogerie disait : « on ne dit plus CEO, mais CVO (Chief Vision Officer) », être visionnaire est indispensable. 

Le plus important, finalement, réside dans la satisfaction client : rien de mieux qu’un client satisfait !

Comment la crise du Covid-19 a-t-elle impacté le comportement du client vis-à-vis du rôle de consultant ?

Je n’ai pas eu tellement de problème vis-à-vis de cela, puisque lorsque les clients font appel à moi, c’est pour combler un besoin identifié, précis. 
J’ai simplement eu moins de demandes car les restaurateurs et hôteliers ont fortement été impacté du fait de toutes ces restrictions, ils avaient d’autres priorités d’investissement que le conseil, d’autant que je n’ai pas fait les démarches pour être certifié Qualiopi. Je suis simplement agréé formateur, et mes clients le savent. Pour le moment, je n’ai pas besoin de cette certification, mais j’envisage de le faire. 

L’Etat français a lancé plusieurs programmes d’aides pour financer des formations professionnelles, ce qui a aidé les entreprises a gardé leurs équipes motivées. Les comportements ont changé, mais je dirais que les besoins se sont accrus. 

Aux lendemains de cette pandémie, le secteur du consulting est donc plus que jamais requis, puisque les restaurants ont besoin de se relever et de continuer, en permanence, à s’améliorer..

Comment t’y prends-tu pour que le client soit satisfait de l’expérience de A à Z ? 

Le plus “difficile” pour moi, c’est mon côté perfectionniste. J’étudie les dossiers dans leur globalité, et un travail que je facture pour une journée, peut en fait m’en prendre deux. J’ai une vraie volonté de documentation, de recherches, etc. Il faut d’autant plus s’adapter lorsque le projet se situe dans une autre région, être novateur et trouver des solutions pour le client. Alain Ducasse disait d’ailleurs, sur la qualité et ce qui est important pour sa cuisine c’est : “le produit, le produit et le produit !”. Je dirais de mon côté : “le travail, le travail et le travail !”. J’adapte mon expérience au client, pour lui procurer tous les outils qui lui permettront d’avancer, et de solutionner certaines procédures opérationnelles, ou certaines manières de travailler. Le client doit sentir que la procédure est personnalisée, et qu’il ne s’agit pas d’un simple processus qui se réitère à chaque mission. Le client est roi, et s’il le ressent c’est que son expérience a été bonne. 

Domaine Louise, Golf de Saint-Tropez, autre établissement accompagné par Tancrède.

Qu’est-ce que tu préfères faire en tant que consultant ? 

Ce que je préfère dans mon métier, c’est la diversité des sujets que j’aborde sur une même journée. C’est la même chose que lorsque je dirigeais des hôtels, ou des restaurants. Certains de mes clients travaillent dans le domaine des boissons botaniques, d’autres dans le ménage et le repassage à domicile, dans le fret maritime, les montres de luxe, l’hôtellerie, la restauration, le commerce de détail, etc.

Actuellement, je travaille sur un projet qui concerne un domaine viticole, et plus particulièrement un restaurant commercial géré par une association employant et mettant à l’honneur des travailleurs handicapés. C’est un dossier très intéressant, pour lequel je réalise une étude de faisabilité pour qu’ils puissent reprendre une ancienne cave, dans le but de faire de l’événementiel, des chambres, et développer le restaurant. Autrement dit, je dois trouver un modèle économique mieux adapté, puisque les subventions vont sans doute être amenées à diminuer ces prochaines années. Il faut que cette association puisse continuer d’exploiter un domaine viticole, et son restaurant commercial et d’entreprise pour les foyers qui se trouvent sur le site. Elle va aussi se développer en proposant des prestations événementielles et d’oenotourisme. Je dois accompagner ce projet de A à Z, et c’est ce qui m’anime. C’est donc surtout de l’accompagnement de projet, des formations, et l’élaboration de stratégies commerciales et de ressources humaines qui me plaisent. En fait, c’est un tout, ce sont autant la diversité de mes actions, que ma capacité d’adaptation, qui font que j’aime aider et m’adapter à mes différents clients. 

Sur quoi te focalises-tu pour une ouverture d’établissement ?

Là encore, il s’agit d’un tout. Initialement, on se focalise sur un benchmark, en étudiant la concurrence. Cela nous permet d’élaborer un positionnement commercial et tarifaire, c’est-à-dire savoir décider si l’établissement a un intérêt à s’affilier à une chaîne ou une marque. J’essaie surtout d’apporter une réelle capacité à avoir un modèle de ressources humaines dans lequel les équipes vont pouvoir se reconnaître, se fédérer, et qu’elles aient toutes le même discours. On parle ainsi de la “vision” du propriétaire, de la “mission” que se fixe l’établissement et les “valeurs” qui doivent être défendues pour y arriver, avec en ligne de mire l’enchantement des clients, en fournissant une prestation mémorable. 

Ensuite, la qualité me tient à cœur, autant pour les produits que pour tout l’aspect ressources humaines. Ainsi, le “sourcing” des fournisseurs est aussi très important dans la réalisation des cartes par exemple. La définition d’un modèle RH propre est une clé de la réussite pour créer une harmonie autour des valeurs et des objectifs de l’entreprise. Ensuite, je mets en place les modules de formation de pré-ouverture, d’ouverture et de post-ouverture, afin de faire adhérer l’équipe à l’image et la promesse de l’entreprise. Giorgio Armani disait « l’élégance ce n’est pas de taper dans l’œil, c’est de rester gravé dans les mémoires ». C’est d’ailleurs ce que l’on cherche dans nos métiers de l’hospitalité, et dans cette volonté de faire vivre une expérience mémorable au client. Il faut se surpasser, aller au-delà des attentes et avoir des comportements, des savoir-être, des savoir-vivre, et des savoir-faire différents. J’œuvre dans ce sens-là !


Un grand merci à Tancrède Barale pour ses réponses et son expérience partagée ! Rendez-vous sur le blog de Sensei pour découvrir d’autres interviews exclusives de talents indépendants de l’hôtellerie-restauration ! 🔥

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